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mardi 24 février 2015

Pourquoi les perquisitions de nuit sont-elles interdites ?

Pourquoi fait-on des lois ? La réponse est généralement parce que cela permet d'organiser les rapports entre les individus qui, sans règles, finissent par faire n'importe quoi. Bref, la règles juridiques ont une raison d'être, quelle soit bonne ou mauvaise. Les motivations d'un texte prennent souvent leur racine dans l'actualité ou dans des événements de société. Pourtant, même en cherchant bien, j'ai du mal à comprendre pourquoi, en matière pénale, il est interdit de faire des perquisitions de nuit  !

Perquisition de nuit
Tout d'abord, pour ceux qui ne sauraient pas ce qu'est une perquisition, deux options : soit vous abandonnez la lecture de ce billet et retournez vivre en ermite dans votre grotte, soit vous jetez un coup d'œil ici avant de poursuivre. Pour les autres, tout va bien vous devriez pouvoir suivre mais interdiction de vous moquer de vos petits camarades (si, si, je vous ai vu esquisser un petit sourire suffisant !).

Bon, trêve de prolégomènes (j'aime bien ce mot qui remplace "blabla" et fait beaucoup plus savant !) et voyons ce que nous dit l'article 59 du Code de procédure pénale :
"Sauf réclamation faite de l'intérieur de la maison ou exceptions prévues par la loi, les perquisitions et les visites domiciliaires ne peuvent être commencées avant 6 heures et après 21 heures."
La règle est claire : pas de perquisition la nuit. Bien évidemment, comme tout principe juridique, il y a un litanie d'exceptions notamment en matière de stupéfiant, de proxénétisme et de traite d'être humain, ainsi que pour toute une une série de crimes et délits (article 706-73).

Si vous lisez attentivement ces différents textes (je note les noms de ceux qui ne l'auront pas fait), vous constaterez que l'on ne vous explique pas pourquoi la police ou la gendarmerie ne pourrait pas venir vous rendre une petite visite courtoise pendant votre sommeil. Il faut donc aller chercher ailleurs.

On peut déjà aller voir un bulletin officiel du Ministère de la Justice dans lequel on vous explique qu'il existe des "exigences constitutionnelles qui garantissent l'inviolabilité du domicile d'une personne au cours de la nuit". J'en déduit que la nuit le domicile est inviolable (et le jour, non ?) et que ce serait un principe constitutionnel.

Humour juridique - Perquisition de nuit
Alors, sachant que la Constitution elle même ne parle pas l'inviolabilité nocturne du domicile (la Constitution de 1958 renvoi à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qui dit uniquement que "la propriété [est] un droit inviolable"), on est obligé de se tourner vers le Conseil Constitutionnel qui, dans une décision de 1996, nous explique que, parmi les "principes et droits de valeur constitutionnelle [...] figurent la liberté individuelle et notamment l'inviolabilité du domicile".

Et la nuit dans tout ça ? Nulle mention. Alors, je me suis dit qu'il fallait aller cherche plus loin et on s'aperçoit alors que l'interdiction de pénétrer dans un domicile de nuit remonte à la période révolutionnaire puisque dans l'article 76 de la Constitution de l'An VIII (1799), il était déjà indiqué que :
"La maison de toute personne habitant le territoire français, est un asile inviolable. Pendant la nuit, nul n'a le droit d'y entrer que dans le cas d'incendie, d'inondation, ou de réclamation faite de l'intérieur de la maison."
Bon d'accord, mais pourquoi ? Qu'est-ce qui motive cette interdiction de faire une perquisition durant la nuit ? Que ce passe-t-il entre 21h et 6h expliquant que le domicile devient alors totalement inviolable ? Comme il serait vain de chercher une explication légale, je vais vous proposer plusieurs très bonnes raisons :
  • Parce que la nuit, on n'y voit rien alors comment la police va-t-elle pouvoir fouiller la maison ... ça c'était vrai avant l'invention de l'électricité et même de la bougie.
  • Parce qu'on ne veut pas déranger les gens dans leur sommeil ... bah oui, dormir est un droit qui devrait avoir une valeur constitutionnelle, non ?
  • Parce que violer un domicile le jour c'est pas grave, mais la nuit c'est pas bien !
  • Parce que la nuit les enfants dorment, alors chut... c'est déjà pas facile de les faire se coucher !
  • Parce que la nuit est un moment de calme (et parfois de volupté) ... alors faudrait voire à pas nous déranger, ma bonne dame !
  • Parce que la nuit, on a beaucoup plus de chance de trouver les gens chez eux ... autant attendre qu'ils soient au boulot pour pénétrer chez eux !
Si jamais vous avez une meilleure explication, je suis preneur !

samedi 11 octobre 2014

Le tabac c'est pas bon ... sauf pour les plus de 12 ans

samedi 11 octobre 2014 | Tags: , , Ajoutez un commentaire
La ministre de la santé l'a annoncé dans son programme de réduction du tabagisme : des mesures seront prises pour "protéger les jeunes pour qu’ils n’entrent pas dans le tabagisme". L'une des propositions de la ministre : Interdire de fumer en voiture en présence d’enfants de moins de 12 ans. En voilà, une idée quelle est belle ! Les petits bambins innocents vont enfin être protégés de tous ces vils fumeurs, forcément méchants et égoïste, qui n'hésite pas à enfumer les petites têtes blondes !

Interdiction de fumer en voiture
Que vous soyez fumeurs s'insurgeant contre cette violation de l'espace privé qu'est votre voiture, ou que vous militiez dans une association anti-tabagisme indigné que la Ministre n'étendent pas cette interdiction à tous les lieux où seront des enfants, vous reconnaîtrez que cette proposition suscite quelques interrogations :

Tout d'abord, la mesure concernerait les enfants de moins de 12 ans. Pourquoi cet âge là ? Personnellement, je me suis dis que j'allais trouver toutes sortes de raisons dans le discours de Marisol Touraine [pdf] ... que nenni ! Alors j'ai un peu fouillé la question, et la seule conclusion à laquelle je suis parvenu c'est que la majeure partie des rapports et études sur les effets du tabagisme sur les enfants ne parle que de ceux ayant 12 ans ou plus. Mais bon, ça me parait un peu léger comme argument. 

Si l'on suit le raisonnement, avec cette proposition, tout enfant ayant au moins 12 ans pourrait donc respirer de l'air enfumé dans une voiture sans que cela pose de problème. Alors de deux choses l'unes  : soit en atteignant 12 ans, l'enfant devient automatiquement immunisé contre la fumée de cigarette et il n'a donc pas besoin de protection, soit .... euh, non vraiment, je ne vois pas ! D'autant que la ministre explique que le but est d'éviter que les enfants ne soient incités à fumer alors que, justement, c'est bien passé 12 ans qu'un gosse risque d'avoir envie de commencer (en moyenne, les enfants fument leur première cigarette entre 15 et 16 ans). D'autre pays l'ont d'ailleurs compris comme l'Irlande par exemple qui va prendre une mesure similaire mais pour tous les enfants de moins de 18 ans.

Ensuite, cette mesure concernerait les conducteurs qui fument avec des enfants à bord. Oui, même si vous êtes l'heureux propriétaire d'une voiture décapotable, vous seriez concernés. En revanche, rassurez vous, vos enfants pourront continuer à respirer les douces volutes des pots d'échappement lorsque vous retrouvez derrière un camion ou bus. Et, bien sûr, chez vous ou en vous promenant à pied, vous serez libre d'enfumer des enfants, surtout si c'est les vôtres (parents indignes!).

Interdiction de fumer en voiture
Autre solution, avoir des vitres teintées pour que personne
ne voient vos enfants assis à l'arrière.
(Les humeurs d'Oli)
La proposition semble d'autant plus anecdotique que sa mise en oeuvre risque d'être difficile. D'abord, les contrôles de polices seront surement très rares car il faudrait attraper le vilain adulte avec la clope au bec allumée alors qu'un enfant est à bord. Les conducteurs en infraction qui apercevront un policier au loin s'empresseront donc de jeter leur cigarette (ce qui fera le bonheur des clochards qui seront  postés à proximité et qui pourront ramasser les mégots !). Et, comment parviendra-t-on à vérifier et contrôler l'âge des enfants à bords (bon évidemment, si c'est un nourrisson, la question sera vite résolue) ?

Et puis, quelle sera la sanction ? Une amende sans aucun doute... voire des retraits de point sur le permis. Ce sera sans doute bon pour les finances de l'Etat mais comme cette mesure concernera principalement des parents, on va les sanctionner plutôt que les responsabiliser ... alors que dès qu'ils seront chez eux, il pourront enchaîner les cigarettes sous le nez de leurs enfants sans que cela ne soit punissable ! D'ailleurs, c'est ce que soutenait le ministère de Madame Touraine en mars 2013 en soulignant, dans une réponse à une question d'un sénateur, que "si cette solution est intéressante, elle peut se heurter au statut privé du véhicule, ce qui ferait douter de la faisabilité d'une telle mesure. D'autres pistes de réflexion doivent être explorées" (un an et demi plus tard, il semblerait que ces réticences se soit envolées).

Sans compter les effets sociaux pervers d'une telle proposition. Imaginez un peu les malheureux parents, qui ne pourront plus s'en griller une dès que leurs gosses sont à bords, et qui subiront les railleries des autres conducteurs, surtout s'il s'agit de parents fumant comme des pompiers, fenêtres fermées, avec leur trois enfants assis sur la banquette arrière, mais qui pourront fièrement vous exhiber la carte d'identité de leur rejetons montrant qu'ils ont plus de 12 ans !

A moins que cette mesure vise à éviter le surpeuplement en donnant un argument supplémentaires à ceux qui ne veulent pas d'enfants. Un enfant ça vous mange vraiment toute votre liberté !

mardi 27 mai 2014

Le don de congés : vous pouviez le faire sans loi, alors légiférons !

Vous avez besoin que vos collègues de travail vous offrent des jours de congés payés pour que vous puissiez être au près de votre enfant malade ? Fort heureusement, vous n'avez pas attendu qu'une loi vous y autorise puisque, dans la pratique et le monde réel, cela pouvait déjà se faire. Sachant que ce que la loi n'interdit pas est permis, quels peuvent bien être les apports de la loi sur le don de congé, adoptée récemment ?

Don de congé payés
Un enfant gravement malade justifie bien un petit geste non?
  • Mesdames et Messieurs les députés, nous avons tous été émus de l'élan de solidarité dont ont sût faire preuve les salariés de la société Phylou & Cie en faisant don, si généreusement, de leurs jours de congés à l'un de leur collègue pour qu'il puisse être aux côtés de son fils gravement malade...
  • Oui, c'est une preuve de la bonté humaine ...
  • Vous avez pu constater que ce geste de fraternité s'est fait spontanément, avec l'accord de l'employeur, alors même qu'aucune loi ne le prévoit. Puisque tout c'est bien passé sans que les législateurs que nous sommes n'interviennent, je propose donc que ... nous fassions une loi ! (Applaudissements dans l'hémicycle)

Ce dialogue n'est malheureusement pas fictif puisque le 9 mai dernier a été adoptée la loi permettant le don de jours de repos à un parent d'un enfant gravement malade. Ce texte avait été proposé en 2011 à l'Assemblée Nationale et s'inspirait de l'histoire d'un salarié de la société Badoit auquel certains de ses collègues avaient fait don de jours de RTT pour qu'il puisse rester auprès de son enfant malade (si vous voulez lire l'histoire et verser votre petite larme, lisez cet article du Monde). En 2012, les députés avaient votés un texte qui a été transmis au Sénat, mais comme la poste marche mal apparemment, il aura fallu attendre deux ans pour que les sénateurs puissent examiner le texte.

Entre temps, plusieurs entreprises, qui n'ont pas attendu qu'une loi soit votée, ont conclu des accords permettant de faire don de jours de repos pour permettre à un salarié d’accompagner un enfant malade. Ce fut le cas notamment dans la société Merial en 2011, dans le Groupe Casino en 2012 [pdf], la mutuelle agricole MSA la même année ainsi que quelques autres.

Alors pourquoi cette loi qui crée deux nouveaux articles dans le Code du travail (L. 1225-65-1 et L. 1225-65-2 ... si une telle numérotation vous étonne, je vous conseil de lire cet article) ? Petit tour des arguments avancés par nos députés et sénateurs pour justifier une loi que rien ne justifiait :
Catherine Deroche, sénatrice
Catherine Deroche
  • car seules les grandes entreprises « où la négociation professionnelle est la plus active [...] offrent à leurs salariés la possibilité de mettre en œuvre ce mécanisme de solidarité. Les salariés des autres entreprises ne disposent d’aucun moyen de faire don des jours de repos dont ils disposent » (propos de Catherine Deroche au Sénat) ... oui, enfin sauf que la loi ne change rien puisqu'il faut l'accord de l'employeur qu'il s'agisse d'une petite ou d'une grande entreprise.
  • car les dispositifs existants (congé de présence parentale, congé de solidarité familiale, congé pour enfant malade) sont insuffisants ... sauf que, dans ce cas, il faut améliorer l'existant plutôt que de créer une loi qui d'ailleurs n'ajoute pas un nouveau dispositif mais se contente de l'inscrire dans un texte.
  • Paul Salen, député
    Paul Salen
    car faire une loi est un moyen « de populariser et favoriser, en autorisant clairement le principe du don de jours de repos rémunérés entre collègues de travail » (propos de Paul Salen lors du débat parlementaire de 2012) ... ah, d'accord, la loi est un support de communication ! Moi qui croyait naïvement que la communication se limitait aux médias traditionnels, je découvre que le Journal Officiel est un outil de communication et de promotion dont l'efficacité ne fait aucun doute.
  • car « même si un texte n’était pas nécessaire, il est à notre sens important, essentiel, que les recours possibles dans des situations de détresse puissent être inscrits dans le corpus législatif, assurant de la sorte une plus grande publicité du dispositif  » (propos de Raymond Durand à l'Assemblée Nationale) ... ça se confirme, la loi sert à faire de la publicité !
Ce dernier député reconnaît donc que cette loi n'était pas nécessaire, ce que confirme d'ailleurs la député Marie-Françoise Clergeau en 2012 en soulignant bien que « aujourd'hui, rien dans la loi n’empêche des salariés de faire don de leurs congés de RTT dans ce même dessein, par exemple, dans le cadre d’un accord d’entreprise. La loi le permet déjà...  ». 

Bon pour être tout à fait honnête, la loi apporte tout de même plusieurs modifications notables : 
  • tout d'abord, les fonctionnaires pourront eux aussi faire dons de leurs congés (ceux qui ont pensés qu'ils en ont déjà trop seront punis) ;
  • ensuite, cela concerne uniquement les enfants des salariés ... si c'est votre mari, votre femme, votre grand-mère ou votre belle-mère ce n'est pas possible ! Pourquoi ? Pour la belle-mère, on comprend mais si c'est pour votre conjoint(e) gravement malade, et bien non vos collègues n'ont pas le droit d'être solidaire (c'est vrai que la solidarité et les enfants malades c'est plus vendeur qu'avec un vieux moustachu qui agonise)
  • par ailleurs, le don sera possible que si l'enfant du salarié à moins de 20 ans ... donc à 21 ans l'enfant malade ne compte plus. C'est vrai qu'après tout, il est majeur à cet âge là et qu'il peut bien s'occuper tout seul de sa maladie quand même !
  • enfin, il faut quelqu'un de « gravement malade nécessitant une présence soutenue ou des soins contraignant » ... et ce sera attesté par un certificat médical. J'imagine déjà le contentieux pour définir la notion de "gravité". 
En revanche, la loi n'a pas prévu les débordements et abus que la pratique des dons de congés va inévitablement générer (ce n'est pas que je sois cynique mais l'expérience m'a rendu lucide sur la nature humaine).  

Pour bénéficier de ces dons, il faudra être très gentil avec vos collègues : n'allez pas pas trop les saouler avec vos ennuis, proposez de faire une partie de leur travail, soyez un bon comédien pour attendrir et/ou faire culpabiliser vos collègues qui ne voudraient pas faire un don pour un pauvre enfant malade. Inversement, vous risquez d'être obligé de négocier un don et là, c'est le début d'un marché noir des congés payés ... Bref, ne risque-t-on pas d’assister à des pressions, à des conflits si des salariés ne peuvent pas, voire ne veulent pas donner des jours de repos ?

lundi 21 avril 2014

La CNIL vous recommande d'accepter les cookies pour pouvoir les refuser !

Après les écoutes téléphoniques et les procédés de géolocalisation réservés aux forces de police, l'informatique et internet constituent un vaste espace où la traque et la commercialisation des données personnelles est livrée à des sociétés commerciales qui vous surveillent avec ... des cookies. Un gentil mot pour désigner un système d'espionnage à peine réglementé.

Les cookies en informatique : la recette
Ceci n'est pas un article de recette !!!
Vous avez forcément entendu parler des cookies, et je ne vous parle pas des biscuits américains, mais d'informatique avec cette pratique qui consiste à ce qu'un site internet stocke sur votre ordinateur un fichier concernant certaines informations vous concernant (historique, préférence, adresse IP, localisation...). Bref ce sont des sortes de traceurs qui servent à analyser votre navigation, vos habitudes de consultation ou de consommation essentiellement pour pouvoir ensuite vous adresser des publicités ciblées.

Contrairement aux écoutes téléphoniques ou aux procédés de géolocalisation qui sont mis en oeuvre par la police à la demande de la justice (tout ceux qui auront pensé "écoutes illégales" sont priés de quitter la salle, mauvaise graine !), les cookies sont des traceurs mis en place et utilisés à des fins privées. Ces petits fichiers vont recenser des informations qui peuvent ou non être personnelles et, en France, leur utilisation relève d'une loi relative à l'informatique et la liberté datant de 1978 (je vous rassure, le texte initial a évolué depuis 1978).

Récemment, la CNIL (la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés) qui se préoccupe notamment de toutes les questions relatives à la conservation et l'usage des données récoltées auprès des consommateurs, est venue donner ses recommandations sur la manière dont doivent être gérés ces cookies. En gros, le principe est que les utilisateurs doivent être informés de l'utilisation de cookies et donner leur accord avant qu'ils soient installés sur leurs disques durs, sauf exceptions bien sûr (si vous voulez en savoir plus sur ces exceptions, vous n'avez qu'à lire la délibération de la CNIL, je ne vais pas vous mâcher le travail quand même).

Les cookies obligatoires sur le site de la CNIL
La CNIL vous informe que vous êtes "suivi" ...
lorsque j'ai vu ça, je n'ai pas pu m’empêcher de me retourner!
Vous me direz que tout ça est bien et que donc il je n'ai pas là aucun motif pour râler ... alors là, c'est sous-estimer ma capacité à trouver des sources de mécontentement. Bref, alors que je parcourais la délibération de la CNIL, je me suis dis que j'allais voir comment celle-ci gérait elle-même les cookies sur son site et, là ...
- aucun message sur la page d'accueil ne m'informe de l'utilisation de cookies

Alors là vous vous dites : il est malin notre Monsieur Phylou, il découvre une contradiction entre les recommandations de la CNIL et e qu'elle fait sur son site ! Et non, pas du tout, la CNIL respecte bien ses propres recommandations puisqu'il est prévu que le consentement de l'utilisateur n'est pas nécessaire lorsque le cookie installé sur votre ordinateur est un outil de mesure d'audience qui ne recueille aucune information personnelle.

En revanche, cela signifie que lorsqu'on a pas à donner notre consentement, le site peut installer un cookie (sans vous le demander) et si, vous souhaiter refuser ce cookie vous le pouvez (à condition de trouver où cette option vous est offerte) et, dans ce cas, eh bien vous aller vous retrouver avec un "cookie d'exclusion" sur votre ordinateur. Donc si on se résume, on a :
  • si vous ne voulez pas de cookies ... pas de problème puisqu'en principe on vous demande votre accord (enfin, on vous prévient qu'il aura un cookies sans vous dire comment vous pourriez l'éviter)
  • sauf que lorsqu'on a pas besoin de votre accord, alors là vous vous retrouvez avec un cookie automatiquement et si vous demandez sa suppression, alors on vous colle un cookie qui sert à ne pas avoir de cookie installé sur votre ordi ?!? What's the fuck ? 
Voilà à quoi on aboutit au nom de la loi et grâce à une commission sur "l'informatique et la liberté" qui cherche en théorie à préserver la vie privée des internautes en leur offrant la liberté d'être obligé d'accepter un traceur lorsqu'on ne veut pas être tracé (oui, oui, je sais que ça ne veut rien dire mais c'est volontaire vil personnages ... une démonstration par l'absurde quoi !).

vendredi 11 avril 2014

On n'écoute pas les gardés à vue en cellule : le commissariat de police, ce havre de liberté !

Alors que les moyens dont la police dispose pour trouver des preuves se multiplient, les droits des gardés à vue sont renforcés avec, désormais, l'interdiction d'écouter les propos que peuvent s'échanger des suspects lorsqu'ils sont dans leur cellules au commissariat ou à la gendarmerie.
  
L'interdiction des écoutes pendant la garde à vue
Les plaidoiries sont un immense moment de créativité.
Tout le monde sait que, pour les besoins d'une enquête, la police peut placer votre téléphone sur écoute, voire même mettre un mouchard pour vous espionner, mais elle a aussi le droit d'enregistrer votre conversation à votre insu dans un lieu privé ou public (les plus courageux iront lire l'article 706-96 du Code de procédure pénale). Certains trouveront cela scandaleux mais je vous rassure, il existe un lieu où vous allez pouvoir discuter tranquillement de vos méfaits sans pouvoir être écouté : les cellules des commissariats de police ou de gendarmerie !

Eh oui, dans une décision de la cour de cassation du 7 janvier 2014, les juges ont considérés qu'enregistrer les conversations de deux personnes gardées à vue, mises dans des cellules contiguës, était « un stratagème constituant un procédé déloyal de recherche des preuves » qui « porte atteinte au droit à un procès équitable et au principe de loyauté des preuves » prévus par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme.

En gros, un juge d'instruction avait autorisé la mise en place d'un système d'écoute dans les cellules de deux personnes suspectées d'être impliquées dans un vol à mains armées et, bien sur, ces deux personnes, dont les cellules étaient côte-à-côte, se sont mis à parler et ont tenu des propos qui pouvaient les incriminés. Scandalisés, les avocats se sont empressés de contester les preuves ainsi récoltées en soulignant que, non mais quand même, écouter des gens à leur insu dans les locaux de la police c'était déloyal et contraire au droit de se taire.

Et là, victoire ! La cour de cassation leur donne raison en soulignant que, certes les règles procédurales de la garde à vue et du placement sur écoute ont été respectées, mais que ce qui est interdit c'est « la conjugaison des mesures de garde à vue, du placement [...] dans des cellules contiguës et de la sonorisation des locaux ». Ben oui, c'est vrai quoi, comment la police, sur les ordres d'un juge d'instruction, a-t-elle osé monter un piège aussi sordide et machiavélique ? (pour ceux qui n'auraient pas compris, et je sais qu'il y en a, il y a un peu d'ironie dans mes propos).

Décortiquons un peu. 

Tout d'abord, ce n'est pas le fait de mettre quelqu'un sur écoute qui est sanctionné, c'est le fait d'utiliser un "stratagème", c'est-à-dire d'une ruse destinée à obtenir des preuves. Et là, de quoi parle-t-on ? La ruse consistait à mettre deux gars dans des cellules proches et à les écouter sans les prévenir. J'avoue que niveau ruse, on a déjà vu bien pire. Mais, bon la haute juridiction considère qu'il s'agissait d'un piège, alors circulez! 

Ecouter au porte, c'est mal
Votre mère vous l'avait pourtant dit :
"c'est mal d'écouter aux portes"
Les choses auraient pourtant été très différentes si on avait mis dans une cellule voisine un policier déguisé en malfrat qui aurait essayé de faire parler un suspect, car là il y aurait eut une incitation à s'incriminer. Mais, dans notre affaire, les gardés à vue se sont mis à parler de leur plein gré et ce n'est pas le fait de les avoir mis côte-à-côte qui les a inciter à s'épancher. Et puis, je sais pas moi, mais s'il a bien un lieu où je vais prendre le risque de parler de mes exploits criminels, c'est bien dans un commissariat avec plein de policiers autour de moi (c'est une hypothèse bien sur, je n'ai rien à me reprocher M. le Commissaire).

Ensuite, ce qui a peut être choqué, c'est que les deux gardés à vue soient écoutés à leur insu pendant leur période de repos, c'est-à-dire entre deux interrogatoires. Ben oui, alors que t'es en train de te remettre de tes émotions, les policiers continuent à t'espionner, c'est scandaleux. Le gardé à vue qui est stressé par les interrogatoires, va dans sa cellule pour se détendre et alors qu'il se sent un peu plus en confiance, pan, on le prend par surprise. Si j'avais été leur avocat j'aurais plaidé l'abus de faiblesse !

Enfin, des avocats n'ont pas hésité à dénoncer ce scandale en soutenant qu'il était « choquant que l'on notifie à un gardé à vue le du droit de se taire mais que ce dernier soit enregistré à son insu ». Pourtant, il me semble bien que si on prévient quelqu'un qu'il peut se taire, c'est justement parce que ce qu'il risque de dire pourrait être utilisé contre lui. Et puis, je sais pas moi, mais si on me dit que j'ai intérêt à me taire, je vais pas m'empresser de jacasser ! Enfin, je dis ça, mais c'est sans doute que nos deux gardés-à-vue avaient besoins de se confesser l'un à l'autre, et la confession c'est sacré, ça doit rester secret.

En conclusion, on peut déduire de la décision de la Cour de cassation que lorsque tu es libre, la police peut t'écouter, mais lorsque t'es enfermé dans une cellule, ce n'est pas permis. Ainsi, la liberté de parler est plus grande lorsqu'on est privé de liberté... C'est-y pas logique ça ma bonne dame !

samedi 29 mars 2014

Géolocalisation : comme les baleines, nous allons bientôt être équipés de balises

Si vous estimiez être trop surveillé et que les gouvernements portent de plus en plus atteinte à votre vie privée (surement parce que vous avez quelque chose à vous reprocher !), eh bien, on va en remettre une couche avec la loi sur la géolocalisation qui a été validée le 25 mars 2014 par le Conseil Constitutionnel.

De la téléréalité grandeur nature : la géolocalisation en 
directe couplée aux systèmes de télésurveillance permettra 
enfin légalement de suivre tous les déplacements des 
délinquants. A quand la diffusion en directe à la télévision ?
La loi, qui  va introduire dans le code de procédure pénale une série d'article 230-32 et suivants, autorisera notamment la police à s'introduire dans un lieu privé, y compris de nuit, pour placer un système de géolocalisation (un dispositif qui permet de suivre vos déplacements, un système de traçage, comme pour les espions, quoi !) soit dans un entrepôt ou un véhicule garé sur la voie publique si le délit ou le crime est puni d'au moins 3 ans d'emprisonnement, ou dans tout autre lieu privé (chez vous par exemple), si la peine encourue est de 5 ans.

Et alors, quoi de nouveau, me demanderez-vous.

En fait, la loi valide ce qui était jusque là une pratique non réglementée, c'est-à-dire que la police posait déjà des systèmes de traçages (GPS, puces...) sur des véhicules ou d'autres objets, sans que cela ne soit officiellement autorisé. J'entends déjà votre réaction :

- C'est trop facile, Monsieur Phylou, d'affirmer comme ça que les services de polices et de gendarmerie faisaient des choses illégales en tout impunité... 
- Oui mais...
- pas de mais, direz-vous en m'interrompant brusquement, vous êtes anti-républicain c'est tout, et vous prenez plaisir à critiquer la police car c'est à la mode.

Oui, j'aime râler, avec mauvaise foi parfois et toujours dans la bonne humeur, mais il se trouve que ce n'est pas moi qui affirme de telle chose, c'est le gouvernement lui même dans un communiqué de presse du Conseil des ministres du 23 décembre 2013 qui nous explique : 
"Le projet de loi vise à donner un fondement législatif strict à des pratiques qui, jusqu’alors, en étaient dépourvu, et reposaient sur des dispositions très générales du code de procédure pénale."
Bon, et alors, ça consiste en quoi cette géolocalisation ? Jusqu'à présent, il était possible de surveiller les déplacements d'une personne grâce à son GPS ou son téléphone (vous savez ce petit appareil que vous avez toujours sur vous, même lorsque vous faites des choses pas très recommandables... vraiment, quel manque de professionnalisme). Toutefois, le suivi n'était pas en direct puisqu'il fallait attendre que les opérateurs téléphoniques fournissent des informations sur les relais qui avaient été déclenchés par le téléphone. Or, les balises de géolocalisation qui vont désormais pouvoir être légalement utilisés permettront de suivre constamment et en direct les déplacement d'un délinquant.

Le téléphone, le pire ennemi des délinquants
Le téléphone, voilà le pire ennemi des délinquants : écoute,
détection GPS ou wifi, et maintenant des mouchards qui 
permettront de les suivre à la trace ... tremblez vils malfrats !
En outre, ce ne sont pas seulement les signaux émis par les GPS ou les téléphones qui pourront être suivis, mais n'importe quel objet dans lequel aura été placé un système de traçage. Votre téléphone, votre voiture et pourquoi pas vos chaussures, votre sac à main ou votre sac à dos...enfin bref, tout ce que vous trimbalez avec vous, pourrait désormais être équipé d'un traceur. Eh oui, Messieurs les délinquants, vous avez intérêt à bien vérifier si un mouchard ou une balise n'a pas été installé à votre insu. Mais, j'y pense, voilà comment je vais pouvoir faire fortune moi : en commercialisant des détecteurs de balises. Bon, c'est sûr que le gouvernement interdira l'utilisation et la vente de tels appareils en France mais, comme ce fut le cas des détecteurs de radars, cela prendra un peu de temps (interdiction d'utilisation en janvier 2012, interdiction de la vente en juin 2003), suffisamment pour que je devienne ... riche... et le roi du monde (bon, je m'égare un peu là).

Bref, pour en revenir à notre sujet, comprenez bien que la police va pouvoir s'introduire dans les lieux privés (oui, chez toi aussi, ) y compris la nuit. Vous risquez donc un jour de vous retrouver nez à nez avec un gars dans votre cuisine au milieu de la nuit et ce ne sera peut-être pas un voleur, mais seulement un gars qui, sur instruction d'un procureur ou d'un juge, rentre chez vous pour poser un mouchard. Gare aux bavures !

Heureusement, il y aura des lieux où l'installation de ces dispositifs de géolocalisation seront interdits : chez les  médecins, les notaires, les huissiers et les avocats. Et puisque les avocats peuvent désormais faire de la publicité, ils devraient vanter la chaleureuse convivialité de leur cabinet qui procurera discrétion et tranquillité à des clients désireux d'y organiser des réunions. Les exceptions concerneront aussi les locaux des professionnels des médias (presse écrite ou ligne, radio et télévision) ainsi que les véhicules des journalistes qui risquent donc d'être la cible des malfrats qui se serviront d'eux pour se déplacer en toute tranquillité (journaliste, un métier de plus en plus dangereux).

Il y en a qui se font des piercing
ou qui se mettent des bouts de
métal sous la peau, alors une
simple puce, pourquoi pas ?
Bien sur, tout cela sera encadré, avec intervention de magistrats ou procureurs de la République et limitation dans le temps de ces mesures de géolocalisation... ouf, j'ai eu peur qu'il puisse y avoir des débordements. Si la justice contrôle tout ça, on est rassuré, c'est pas comme si il y avait déjà eu le scandale des surveillances de la NSA.

Je vous entends déjà dire : Vous râlez, vous râlez, mais vous proposez quoi alors ? Tout d'abord, je pense que l'on pourrait implanter une puce électronique dans le cerveau de tous les citoyens (on le fait bien pour suivre des baleines et elles ne se sont jamais plaintes, alors je vois pas où est le problème). Cela permettra non seulement de toujours pouvoir localiser une personne (lorsque c'est autorisé bien sûr) mais, en plus, on pourra aussi déceler les intentions de tout un chacun grâce à un habile traitement des impulsions électriques qui parcourent notre cerveau. Ainsi, on arrêtera les délinquants avant même qu'ils agissent... ça me rappelle un film, pas vous ?

Si, vous trouvez que cela fait trop, je propose de mettre un mouchard dans toutes les cartes bleus, mais ce n'est pas aussi efficace car les plus pauvres (ou les plus malins) qui ne se baladent pas avec une carte échapperont à la surveillance.

Et vous, vous en pensez quoi ?

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