Alors que vous prélassiez au soleil ou sous la pluie vivifiante qui a égayée cet été 2014, vous êtes passé à coté des lois importantes que votre législateur a eu la bonne idée de faire entrer en vigueur durant vos congés. Certains seront admiratifs devant l'abnégation du législateur qui sacrifie ses vacances, d'autres penseront que faire passer des lois en plein été est un bon moyen pour que personne ne s'en rende compte... mais les plus futés auront noté que toutes ces lois avaient été votée avant les vacances et qu'elles ont simplement été promulgués en juillet / août.
Tout d'abord, dans le domaine économique, on a eu le droit à une loi du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire qui est en fait un vaste fourre-tout ... voyez-vous même :
- la première partie de cette loi définit ce qu'est l'économie sociale et solidaire (blabla blabla blabla) et surtout créée un Conseil supérieur, une Chambre française et des chambres régionales de l'économie sociale et solidaire (youpi! plein de nouveaux organismes administratifs) ;
- ensuite viennent des dispositions visant à "faciliter" la reprise d'une entreprise par ses salariés ce qui est sans doute bien mais la loi ajoute aussi des contraintes (information préalable des salariés, suivi d'un délai pendant lequel aucune vente ne peut avoir lieu sauf au profit des salariés...) qui risque de rendre la transmission d'une société plus compliquée encore ;
- puis, la loi parle des coopératives avec, inévitablement, la création d'un Conseil supérieur de la coopération ;
- la loi évoque aussi les assurances et mutuelles, mais là, surprise, aucun Conseil supérieur n'est institué ... faut dire qu'il existe déjà une Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ;
- enfin, tout un pan de la loi est consacré aux associations avec la création ... devinez ! ... d'un Haut Conseil à la vie associative.
Bilan : pas moins de 5 nouveaux organismes administratifs ce qui, à n'en pas douter, va rendre l'économie plus sociale et solidaire (ceux qui n'auraient pas perçu l'ironie dans cette phrase sont condamnés à lire le texte de loi dans son intégralité ! Je sais, la sentence est rude.)
Une loi anti amazon ou pro libraire ? |
Conséquence, pour un livre qui coûte 10€, si vous l'achetez en librairie vous pourrez l'avoir à 9,5€ alors qu'en l'achetant sur le net vous paierez 10€ plus les frais de livraison (sachant que Amazon, et le FNAC, ont d'ores et déjà réagit en mettant leurs frais de livraison à 0,01€). Donc, il devient théoriquement plus avantageux d'aller en librairie mais il est probable que les gens seront prêt à payer 5% de différence pour pouvoir choisir et se faire livrer un livre sans bouger de chez eux. Reste à voir si ce texte ne sera pas censuré au niveau européen !
Pas sur que la réforme ferroviaire simplifie les choses ! |
Vu dans un article du Piment rouge Harnésien |
Avec cette loi, le législateur vient dire que, même en l'absence de mention du TEG, les prêts sont valides, et ce avec l'aval du Conseil Constitutionnel qui considère que cette loi rétroactive ne pose pas de problème. Et alors me direz-vous, c'est une bonne ou une mauvaise chose ? Question de point de vue : pour les collectivités locales (donc indirectement l'Etat et donc le contribuable), cela signifie qu'elles devront rembourser leurs crédits au taux fort. Pour les établissement prêteurs, c'est un soulagement car cette loi empêchera en principe qu'ils perdent près de 17 milliards d'euros. L'Etat sauve les institutions financières, encore une fois !
Je vous rassure, les deux loi de cet été ne changeront rien à la complexité du droit du travail. |
Par ailleurs, il faut noter la loi du 1er juillet sur la procédure prud'homale qui simplifie la procédure en cas de rupture du contrat de travail par un salarié. Un salarié peut démissionner mais il peut aussi décider de rompre son contrat en invoquant une faute de l'employeur (ex: Monsieur le Directeur, ça fait 6 mois que je ne suis pas payé donc je rompt mon contrat de travail à vos torts ... évidemment ça ne marche pas si vous êtes bénévole ou stagiaire). Evidemment, dans ce cas, l'affaire passait généralement devant le Conseil des Prud'hommes pour savoir si la rupture est ou non imputable à l'employeur et si ce dernier devait verser des indemnités au salariés. Comme dans toute procédure prud'homale (sauf quelques exceptions), l'affaire allait d'abord devant le bureau de conciliation avant de pouvoir être jugée, souvent plusieurs mois après (généralement plus d'un an).
Désormais, pour les ruptures à l'initiative du salarié, l'affaire va directement devant le bureau de jugement avec une audience qui se tient dans le mois suivant sa saisine (oui, oui, j'ai bien dit saisine et pas saisie ... faudrait voir à réviser votre jargon !). A quand une généralisation de la suppression du passage (très/trop souvent inutile puisque seuls 7% des litiges sont réglés par la conciliation) devant le bureau de conciliation ?
Désormais, pour les ruptures à l'initiative du salarié, l'affaire va directement devant le bureau de jugement avec une audience qui se tient dans le mois suivant sa saisine (oui, oui, j'ai bien dit saisine et pas saisie ... faudrait voir à réviser votre jargon !). A quand une généralisation de la suppression du passage (très/trop souvent inutile puisque seuls 7% des litiges sont réglés par la conciliation) devant le bureau de conciliation ?
Dans le domaine international, nous avons eut la loi d'orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale. Un titre long, comme je les aime avec une loi tout aussi longue contenant essentiellement des déclarations de principe sur l'action de la France en matière développement durable dans les pays en développement dans le domaine économique, sociale, environnementale et culturelle. Alors qu'une loi a, en principe, pour objectif de créer des règles, ce texte n'est pour l'essentiel composé que de déclarations d'intention et de définitions d'objectifs politique. Alors pourquoi faire une loi dans ce cas ? La réponse est sans doute dans l'article 4 qui créé un Conseil national du développement et de la solidarité internationale. Et hop, une nouvelle instance administrative qui vient s'ajouter aux centaines d'autres. Je propose la création d'un Haut commissariat du recensement des organismes administratifs qui listera les diverses agences, autorités, conseils, commissions, comités, instituts ...
Pour ceux qui ne l'auraient pas compris la "justice restaurative" à la française, dérive d'un concept anglo-saxon |
- suppression des peines planchers introduite par le gouvernement Sarkozy,
- instauration de la "justice restaurative". Oh, le beau mot barbare que voilà; un terme d'origine anglo-saxonne qui fait sans doute plus in que l'expression "justice réparatrice" qui aurait pourtant eut le mérite d'être plus explicite puisque l'objectif de ce concept est notamment de permettre la réparation des préjudices subis par la victime en facilitant le dialogue avec l'auteur de l'infraction. Mais, bon je dis ça mais c'est vrai que je dois être old school, pour ne pas dire ringard,
- création d'un nouveau type de peine appelé la "contrainte pénale" (qui est un mélange de sursis avec mise à l'épreuve et de travail d'intérêt général)
Voilà, c'est finiiiiiii ...
Il n'y aura aucune note de sarcasme dans cette légende car la parité et l'égalité des sexes, c'est comme la religion: difficile d'en rire avec tout le monde! |
- dans le monde professionnel, les entreprises seront obligée d'engager des négociations sur les écarts de salaires et le déroulement de carrière. Sinon ... ? Bah, on les forcera à négocier : c'est un nouveau concept la "négociation contrainte" !
- on va remplacer le "complément de libre choix d'activité de la prestation d'accueil du jeune enfant" par la "prestation partagée d'éducation de l'enfant". Formidable changement sémantique (avec un effort de simplification que j'applaudis de mes deux enclumes). Cela concerne l'allocation versée en cas de congé parental. Désormais, si chacun des parents partage ce congé, le couple aura une allocation plus importante que s'il est pris en totalité par le père ou la mère. L'égalité s’immisce donc dans le couple en privilégiant les parents qui se partageront successivement un congé parental (limiter votre liberté de choix pour favorise l'égalité ... cela signifie-t-il qu'être égaux est plus important qu'être libre ?)
- le père pourra accompagner la future maman à trois examens médicaux (Messieurs, vous n'aurez plus d'excuse pour refuser d'allez à l'échographie)
- et puis on a eu droit à la suppression de la notion de "bon père de famille" (une expression d'origine latine désignant quelqu'un qui agit prudemment et avec sagesse) qui est remplacé par le terme "raisonnablement" ... voilà une grande victoire symbolique des mères de familles qui devront malgré tout poursuivre leur combat contre le père Noël, le père Goriot, le père Fouras, le père Fouettard et le père Lachaise.
Cet été aura donc été riche en nouvelles loi, sans compter 8 ordonnance, 645 décrets et 2221 arrêtés en deux mois... ce n'est pas ça l'inflation législative ?
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